Des averses sont annoncées dans les prochains jours après un mois record de faible pluviométrie enregistrée à l’échelle provinciale. Lorsque les systèmes d’irrigation goutte à goutte ne sont pas gérés de manière à assurer une humidité appropriée et constante du sol, des pluies soudaines et abondantes vont provoquer des poussées de croissance qui favoriseront l’apparition de la pourriture apicale (carence en calcium) sur les fruits de tomate et de poivron.
Étant donné que le calcium est peu mobile dans la plante, des températures chaudes accentuent le désordre en favorisant un développement végétatif accéléré. Aussi, tout ce qui affecte la santé et la vigueur racinaire va limiter l’absorption du calcium au niveau des racines : sol compacté, sol sec ou gorgé d’eau, maladies racinaires, sarclage trop agressif.
Pour l’instant, le problème est signalé sous abris froids (tunnels chenilles, serres) en production biologique dans du poivron allongé tel que le Carmen. Au bout du fruit, on observe une zone verte plus foncée qui devient beige et nécrosée.
Voici les bonnes pratiques afin de limiter le problème :
- Assurer une irrigation constante et suffisante afin de conserver une bonne humidité du sol. Ceci va limiter les poussées de croissance en dents de scie causées par des irrigations trop fluctuantes ou à la suite d'averses qui surviennent après une période de sécheresse. Éviter le fanage des plants causé par un sol trop sec pendant le jour et trop humide durant la nuit. Cette consigne sur une bonne conduite de l’irrigation est la plus importante.
- Les carences en calcium peuvent être dues à une déficience au niveau du sol bien que ceci soit peu fréquent. La disponibilité en calcium décroit avec le pH et sous un pH de 5.2, de l’aluminium libre est relâché et interfère avec l’absorption du calcium par la plante. Faites attention de ne pas surfertiliser en calcium, car cet élément entre en compétition au niveau racinaire avec le potassium et le magnésium, ce qui pourrait nuire à leur bonne assimilation et entraîner des problèmes de coloration des fruits.
- De la mi-juin à la mi-juillet, lorsque la photopériode est longue et que le temps est chaud et sec, il y a une compétition importante entre le calcium mobilisé par une croissance active du feuillage et le grossissement rapide des jeunes grappes de fruits. Durant cette période, on peut fournir de 2 à 4 kg/ha de calcium par semaine dans le système de goutte-à-goutte. Par contre, si le sol contient suffisamment de calcium disponible, l’impact de ces ajouts additionnels en plein champ n’a jamais été démontré. Autre système de culture, autre pratique, car pour la tomate de serre cultivée hors-sol, l’ajout de calcium dans la solution nutritive est indispensable.
- Certaines variétés de tomate et de poivron sont plus fragiles, notamment les variétés hâtives et qui produisent beaucoup de fruits et de façon concentrée : tester des variétés différentes. Les variétés de tomate ronde à gros fruits, certaines tomates italiennes et quelques variétés hâtives de poivron (Ace, Carmen) sont plus fragiles à la pourriture apicale.
- Pour le poivron cultivé sous abris froids, une bonne régie de taille des premiers fruits et des premiers drageons permet de réduire les risques pour les variétés telles que Carmen, Escamillo et Camelot. Pour en connaître davantage sur cette technique, consultez le Guide de production : Poivron et de tomate biologiques sous abris (cf. chapitre 6, pages 128 à 132).
Note : Les traitements foliaires à base de calcium sur les fruits ne sont pas réputés très efficaces pour limiter la pourriture apicale du poivron et de la tomate. L’épiderme des fruits est cireux tout en étant peu pourvu en stomates qui sont de minuscules ouvertures assurant les échanges avec le milieu extérieur (absorption minérale, transpiration, respiration, etc.). Les stomates sont surtout présents sur les feuilles.
Premier foyer de moucheture bactérienne dans la tomate de champ en Montérégie (Pseudomonas syringae pv. Tomato).
Lorsque des foyers de maladies sont décelés dans un champ, les traitements sont habituellement répétés aux 7 à 10 jours. Toutefois, en l’absence de précipitations, les traitements peuvent être espacés aux 10 à 14 jours. Pour le revoir les stratégies d’intervention, consultez l'avertissement Nº 3 du 11 juin 2020.
Dans les tunnels en production biologique, quelques cas d’alternaria ont été rapportés dans l’aubergine et la tomate. Pour connaître les produits homologués en production biologique, consultez le bulletin d'information Spécial phytoprotection bio du RAP Général.
À noter que l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) a statué que les pesticides homologués pour le champ et pour la serre peuvent être utilisés sous tunnels, en serres froides et en serres trois saisons (Santé Canada, 2015).Toutefois, cette position pourrait changer éventuellement, un comité de l’ARLA réévalue la situation.
Les premiers adultes de punaise terne et de punaises pentatomides ont été observés en très faible présence, mais à surveiller. Le seuil d’intervention au Québec est de 5 punaises (toutes espèces confondues) sur 25 plants dépistés. Les nymphes sont visibles sur le paillis de plastique lorsque le plant est légèrement secoué. À surveiller aussi, dans l’aubergine et le poivron, la présence de boutons floraux ou de jeunes fruits qui brunissent et tombent au sol. Dans la tomate, l’insecte a tendance à s’attaquer directement au fruit.
Sur les aubergines, les tétranyques sont présents sous les vieilles feuilles, mais ne nécessitent pas d’intervention pour l’instant. Les pucerons sont sous contrôle dans les champs traités et leur présence ne nécessite pas d'intervention en général ailleurs pour l'instant.
Doryphores
Début de ponte dans les aubergines dans la plupart des régions. En Montérégie et dans la Capitale-Nationale, les premiers traitements ont été déclenchés à l’émergence des larves. Dans la région de la Capitale-Nationale, un traitement a été nécessaire contre des adultes plus agressifs que d’habitude dans l’aubergine.
Cette année, l’activité du doryphore progresse moins que prévu et de manière erratique à la suite du temps sec. En conditions de sol sec, la diapause pourrait être prolongée, ce qui retarderait l’émergence et la ponte. Cela pourrait aussi causer une défoliation inhabituelle par des adultes : à surveiller puisque les traitements insecticides sont moins efficaces contre les adultes que contre les jeunes larves. Les températures élevées accélèrent le cycle de développement des doryphores : selon la température, les larves apparaissent dans les 5 à 11 jours qui suivent la ponte.
Pour la stratégie de traitement foliaire contre le doryphore de la pomme de terre, consultez l'avertissement Nº 2 du 4 juin 2020.
Chrysomèle trirayée de la pomme de terre (Lema daturaphila)
Des cas de cette chrysomèle ont été signalés de façon plus importante cette année dans la cerise de terre en production biologique. Lorsque d’autres plantes de la famille des Solanacées sont présentes dans l’environnement immédiat, la chrysomèle trirayée peut s’y s’attaquer, mais l’insecte préfère la cerise de terre.
Les œufs de la chrysomèle trirayée ressemblent beaucoup à ceux du doryphore. Selon Jean-Philippe Légaré du Laboratoire d’expertise et de diagnostic en phytoprotection (LEDP), les œufs du doryphore sont plus allongés, plus dressés à la verticale et sont luisants et propres. Ceux de la chrysomèle sont un peu moins effilés, sont moins dressés et sont souvent recouverts d’une substance visqueuse.
Cette publication de l’Université du New Hampshire a de bonnes photos de larves et d’œufs.
Le TROUNCE est homologué en biologique contre les coléoptères et semble être efficace sur les larves de chrysomèle trirayée lorsque la pression le justifie. Aucun seuil de traitement n’est reconnu, mais celui recommandé pour le doryphore de la pomme de terre peut servir de référence.
En raison de la crise de la COVID-19, le Québec pourrait faire face à une perturbation de son approvisionnement d’équipements de protection individuelle (EPI) au cours de l’été 2020, laquelle perturbation pourrait mener à une pénurie. En toute circonstance, le respect des étiquettes des pesticides et le port d’EPI approprié sont obligatoires (article 36 du Code de gestion des pesticides). La meilleure protection contre l’exposition aux pesticides est de porter un équipement de protection individuelle. Si vous n’êtes pas en mesure de vous procurer un EPI :
|
Toute intervention de contrôle d’un ennemi des cultures doit être précédée d’un dépistage et de l’analyse des différentes stratégies d’intervention applicables (prévention et bonnes pratiques, lutte biologique, physique et chimique). Le Réseau d’avertissements phytosanitaires (RAP) préconise la gestion intégrée des ennemis des cultures et la réduction des risques associés à l’utilisation des pesticides. |
Cet avertissement a été rédigé par Christine Villeneuve, agr. (MAPAQ) et Karine Fortier-Brunelle, agr. (MAPAQ). Pour des renseignements complémentaires, vous pouvez contacter les avertisseures du réseau Solanacées ou le secrétariat du RAP. La reproduction de ce document ou de l’une de ses parties est autorisée à condition d'en mentionner la source. Toute utilisation à des fins commerciales ou publicitaires est cependant strictement interdite.