La plupart des plantations sont terminées. Difficultés de reprise dues au climat et aux dommages de stress climatiques. Avis de traitements contre le puceron dans les têtes des plants de poivron en Montérégie-Ouest. Les autres insectes sont plutôt calmes. Aucun cas de maladie bactérienne ou fongique rapporté jusqu’à maintenant. Stratégie de traitement pour les maladies bactériennes de la tomate.
La plupart des plantations sont terminées. Le temps frais, sec et venteux ainsi que le gel de la semaine passée rendent la reprise plus lente, mais on observe peu de pertes au champ. Le temps sec généralisé se poursuit, mais les jeunes plants consomment peu d’eau et les systèmes d’irrigation goutte à goutte suffisent à la tâche. Les plantations les plus avancées de poivron et d’aubergine portent des boutons floraux et on observe un début de nouaison de la 1re grappe de tomate.
L’effet du vent et de l’alternance du chaud et du froid sur les feuilles est facile à confondre avec les taches foliaires dues à des maladies :
ENVOLÉES DE PUCERONS AILÉS DANS LE POIVRON EN MONTÉRÉGIE-OUEST
Des avis de traitements ont été émis dans des champs de poivrons en Montérégie-Ouest étant donné la présence de pucerons ailés et l’établissement de colonies dans la tête des plants. Ailleurs, quelques pucerons ont été signalés sur les feuilles et non dans les têtes. L’insecte demeure à surveiller étroitement surtout si le temps sec persiste.
Les plantations les plus avancées, c'est-à-dire celles plantées de la mi-mai à la fin mai et qui présentent de jeunes boutons floraux, sont très attirantes pour les pucerons ailés. Les pucerons, en s’alimentant sur les pousses terminales des plants, peuvent provoquer la chute des boutons floraux et compromettre la croissance normale.
Le seuil de tolérance est très faible lorsque les têtes de jeunes plants sont atteintes et ceci nécessite une intervention rapide. Inspecter de près les parties terminales des plants. Les adultes noirs ailés se cachent souvent entre les boutons floraux et les pucerons verts aptères (sans ailes) peuvent se dissimuler dans les jeunes feuilles enroulées. Consultez le bulletin d’information Nº 3 pour obtenir la liste des insecticides homologués contre le puceron dans le poivron.
Autres insectes
Dans les tunnels chenilles, les abris froids et dans certains champs, quelques collaborateurs ont signalé une faible présence de tétranyques et le début de la ponte des doryphores dans l’aubergine. Il faut attendre l’arrivée des jeunes larves pour initier les traitements. Référerez-vous à l’avertissement Nº 2 pour le seuil et la stratégie de traitement.
Des altises sont signalées dans des tomates sous tunnels chenilles et en champ dans la tomate et l’aubergine. Les populations sont encore faibles pour le moment. Voici les seuils d’intervention recommandés dans ces deux cultures dans le Nord-Est américain :
- Jeunes plants récemment plantés : 2 altises/plant
- Plant de 8 à 15 cm : 4 altises/plant
- Plant > 15 cm : 8 altises/plant
Pour l’instant, aucun cas ne nous est rapporté. Le temps asséchant, combiné à la faible pluviométrie, diminue les risques d’éclosion de foyers de maladies bactériennes.
Par ailleurs, il faudra redoubler de vigilance après les pluies annoncées cette semaine. Chaque année, le chancre bactérien (Clavibacter michiganensis subsp. Michiganensis) et la moucheture bactérienne (Pseudomonas syringae pv. tomato) sont signalés dans la tomate de champ cultivée au Québec. Si des pluies surviennent, dépister rapidement les champs pour déceler les premiers plants porteurs de bactéries afin de déclencher les premiers traitements. Du côté des résistances variétales, seules quelques variétés de tomate italienne possèdent des résistances à différentes races de la moucheture bactérienne.
Les cultures sous abris froids (tunnels, serres froides) sont épargnées par les bactérioses à moins que le chancre bactérien ne se soit introduit par la semence. Dans la tomate de champ, les dommages sont très variables et vont dépendre surtout des épisodes de pluie et des blessures qui peuvent être infligées aux plants par la grêle et les vents violents.
Les températures inférieures à 25 °C sont plus favorables à la moucheture bactérienne alors que le chancre bactérien se propage plus intensément au-delà de 25 °C. Des plants stressés (sol compacté, excès et manque d’irrigation, déséquilibre au niveau des fertilisants) vont également être plus vulnérables aux infections bactériennes.
Début des traitements bactéricides
Les premiers traitements sont déclenchés au tout début des premiers foyers d’infection observés.
Moments et fréquence des traitements
En général, on recommande de faire les applications au cuivre avant la pluie, car les ions de cuivre seront relâchés par la présence d’un film d’eau sur le feuillage des plantes. Dans le cas d’autres produits à action bactéricide, les étiquettes mentionnent parfois de les appliquer après la pluie. L’action des bactéricides est protectante et non systémique. Cela signifie que le nouveau feuillage n’est pas protégé par les applications précédentes.
Fréquence des traitements
- 5 à 7 jours : pression élevée de la maladie, temps pluvieux, rosées abondantes
- 7 à 10 jours : pression modérée de la maladie, temps mitoyen
- 10 à 14 jours : pression faible de la maladie, temps sec
Les traitements sont délavés par des averses supérieures à 25 mm étant donné qu'aucun traitement bactéricide ne possède d'action translaminaire ou systémique. Toutefois, les traitements bactéricides répétés sont souvent décevants pour la répression des maladies bactériennes. En effet, selon plusieurs travaux de recherche et au fil des observations relevées par les agriculteurs et les conseillers agricoles, les pulvérisations à base de cuivre ou avec d’autres produits n’apportent que de minces avantages et seulement lorsque la pression des maladies bactériennes est de faible à modérée. D’après une synthèse allemande citée dans le document Peut-on se passer du cuivre en agriculture biologique? (Institut national de la recherche agronomique), l’emploi de cuivre éviterait des pertes moyennes évaluées à seulement 10 à 15 % en productions légumières.
Les pulvérisations
Les bactérioses sont très difficiles à contrôler en comparaison avec des maladies fongiques (alternariose, tache septorienne, mildiou). Dans le cas des bactéries, les pulvérisations de cuivre ou d’autres bactéricides agissent uniquement comme protectants. Ces produits ne pénètrent pas les tissus végétaux et atteignent uniquement les bactéries présentes sur la surface des parties aériennes de la plante.
À partir du moment où les bactéries pénètrent la feuille, elles sont protégées et continent à se multiplier. En 24 heures, plusieurs millions de bactéries peuvent être produites, ce qui est un atout certain pour leur dissémination. Par contraste, dans le cas des fongicides, plusieurs ont des actions systémiques et translaminaires dans les plantes et peuvent empêcher la germination des spores et la formation d'un feutre mycélien, ce qui permet de maîtriser les infections et de freiner leur propagation.
Par ailleurs, des pulvérisations mal réalisées (pression trop forte, mauvaise couverture foliaire) peuvent faire plus de mal que de bien en déclenchant de nouveaux foyers d’infection.
Les produits, l'importance de leur rotation et les précautions à prendre avec le cuivre
À la suite de leurs travaux, plusieurs chercheurs et conseillers agricoles vont favoriser l’alternance des pulvérisations à base de cuivre avec des produits différents tels que : REGALIA MAX (Reynoutria sachalinensis) , SERENADE OPTI et SERENADE MAX (Bacillus subtilis), TAEGRO 2 (Bacillus subtilis var. amyloliquefaciens), TIVANO (acide lactique et citrique), OXIDATE 2.0 ou OXIDATE (peroxyde d’hydrogène et acide péracétique). Selon l’étiquette, OXIDATE est homologué uniquement contre la moisissure olive et le Botrytis. Par contre, son action désinfectante atteint autant les bactéries que les champignons.
Plusieurs de ces produits sont permis en production biologique : toujours consulter votre organisme de certification avant d’utiliser un produit.
Plusieurs raisons sont invoquées pour diminuer les usages du cuivre et alterner avec d’autres bactéricides, soit la résistance, la phytotoxicité, les taches sur les fruits ainsi que la contamination de l’eau et du sol :
1. Résistance
Le cuivre est appliqué depuis des décennies sur les populations de bactéries phytopathogènes. L’apparition de souches de bactéries plus ou moins résistantes au cuivre est documentée un peu partout que ce soit en Ontario, aux États-Unis ou en Europe. Au Québec, en 2008, des échantillons de plants infectés par le chancre bactérien et la moucheture bactérienne ont révélé la présence de bactéries résistantes au cuivre. Étant donné que le cuivre est toujours utilisé depuis ce temps, il serait surprenant que les résistances aient disparu et le contraire ne serait pas étonnant, à savoir que les souches de bactéries indigènes auraient acquis au fil des ans encore plus de résistance!
2. Phytotoxicité
Tous les bactéricides présents sur le marché actuellement sont composés de cuivre fixe qui deviennent solubles dans l’eau et qui sont relâchés sur le feuillage plus ou moins lentement. Ceci permet de diminuer les risques de phytotoxicité tout en améliorant l’activité résiduelle. Lorsque le cuivre est relâché en excès, la plante en absorbe trop, ce qui peut freiner le développement des plants, provoquer l’avortement des fleurs, causer des brûlures soit par des taches jaunes ou brunes sur le feuillage ou des lésions sur les marges des jeunes pousses. Ces phytotoxicités reliées au cuivre sont relevées par les agriculteurs et documentées dans la littérature. À noter que l'OXIDATE peut être phytotoxique aussi par temps chaud ou lorsque les plantes sont stressées (consulter l’étiquette).
Le cuivre peut être phytotoxique sous certaines conditions :
- Conditions météorologiques : par temps humide et frais, lorsque le feuillage s’assèche trop lentement, un excès d’ions de cuivre est relâché. Des températures trop élevées, trop venteuses et lorsque les plants sont en stress hydrique sont à éviter. Il vaut mieux faire les pulvérisations en matinée ou en fin de journée alors qu’il y a de faibles vents, afin de permettre au feuillage de s’assécher suffisamment rapidement.
- Applications trop fréquentes ou avec des doses trop élevées surtout lorsque la pluie n’entraîne pas de lessivage. À la suite d'une averse, une trop grande concentration de cuivre sera alors relâchée. Des pulvérisations excessives vont laisser un épais dépôt bleu sur le feuillage, ce qui peut limiter la photosynthèse et retarder la croissance des plants.
- PH acide de la solution < 5.5 à 6.5, ce qui favorise le relâchement de trop d’ions de cuivre dépendamment de la formulation du produit. Certains pesticides et adjuvants peuvent accentuer le problème en acidifiant la solution ou en favorisant la pénétration du cuivre dans les feuilles.
3. Taches sur les fruits
À la suite des applications trop répétées, le cuivre peut s’accumuler en dépôts blanchâtres sur les fruits et en diminuer la qualité marchande.
4. Contamination du sol et de l’eau
Le cuivre s’accumule dans les sols et on parle de contamination lorsque les quantités de Cu sont supérieures à 20 mg Cu/kg de sol. Les sols en excès de cuivre vont nuire à la bonne croissance des plantes, aux microorganismes bénéfiques, aux vers de terre et dans le cas des sols sableux, le cuivre peut contaminer l’eau.
Pour en savoir plus
- Moucheture bactérienne, Éphytia
- Chancre bactérien, Éphytia
- Maladies bactériennes de la tomate, ministère de l'Ontario
- Lutte aux maladies et résistance au cuivre dans le poivron et la tomate en production biologique
- How Copper Sprays Work and Avoiding Phytotoxicity
- Prevalence of Copper Resistance among Foliar Bacterial Pathogens of Tomato in Tennessee
- Thirteen decades of antimicrobial copper compounds applied in agriculture. A review
- Managing Bacterial Spot in Ontario Tomatoes: Updated Best Management Practices for Field Production juin 2019
- Travaux de Mary Hausbeck Ph.D. sur le chancre bactérien, Université du Michigan
- Travaux de Sally A. Miller, Ph. D. sur les maladies bactériennes de la tomate, Université de l'Ohio
Toute intervention de contrôle d’un ennemi des cultures doit être précédée d’un dépistage et de l’analyse des différentes stratégies d’intervention applicables (prévention et bonnes pratiques, lutte biologique, physique et chimique). Le Réseau d’avertissements phytosanitaires (RAP) préconise la gestion intégrée des ennemis des cultures et la réduction des risques associés à l’utilisation des pesticides. |
Cet avertissement a été rédigé par Christine Villeneuve, agr. (MAPAQ) et Karine Fortier-Brunelle, agr. (MAPAQ). Pour des renseignements complémentaires, vous pouvez contacter les avertisseures du réseau Solanacées ou le secrétariat du RAP. La reproduction de ce document ou de l’une de ses parties est autorisée à condition d'en mentionner la source. Toute utilisation à des fins commerciales ou publicitaires est cependant strictement interdite.