S. Mathieu1, B. Duval1 et V. Samson1
1. Agronome (MAPAQ)
Le gel des apex est critique pour le blé d'automne. Si ces tissus fragiles, qui formeront l’épi complet, gèlent, les dégâts seront majeurs et le rendement en sera affecté. À la montaison, une température de -4 °C pendant plus de deux heures peut causer des dommages aux points de croissance. Au stade tallage, une température de -11 °C serait nécessaire pour réduire le nombre de talles et causer d’autres dommages (voir tableau 1).
Tableau 1 : Températures pouvant causer des dommages en fonction du stade physiologique du blé d'automne, symptômes et impact potentiel sur le rendement
Stade du blé | Température (d'une durée de 2 heures) pouvant causer des dommages |
Symptômes liés au gel | Impact probable sur le rendement |
Tallage | -11 °C | Chlorose des feuilles, brunissement du bout des feuilles, odeur d'ensilage | Faible à modéré |
Montaison | -4 °C | Mort du point de croissance, jaunissement ou brunissement des feuilles | Modéré à sévère |
Gonflement | -2 °C | Stérilité des florets, épis coincés dans la gaine, dommages au bas des tiges, décoloration du feuillage. | Modéré à sévère |
Les conséquences de l'effet du gel dépendent des éléments suivants :
- La température atteinte sous la barre du zéro, la durée du gel et le stade de développement du blé.
- L’humidité du sol : un sol humide dégagera de la chaleur pendant la nuit et empêchera la température de s’abaisser rapidement tandis qu’un sol sec est plus à risque.
- La topographie du champ : les zones basses sont plus à risque d’être endommagées.
- Les variétés : certaines variétés sont plus fragiles
- Le développement foliaire des plants : plus les plants ont de feuilles, plus le point de croissance est protégé. Certains champs sont actuellement au stade « début montaison », mais le point de croissance est encore situé très bas dans la tige. Il se trouve donc protégé.
Si le gel a eu lieu au stade « tallage », après quelques jours, on pourra observer un brunissement du bout des feuilles, une chlorose et une odeur d’ensilage peut également être perçue. À ce stade, le point de croissance est heureusement protégé puisqu’il est encore sous le sol. Les dommages occasionneront un ralentissement de la croissance des plants et une diminution du nombre de talles, mais le blé reprendra son développement par la suite.
La décoloration du feuillage n’indique pas nécessairement que le rendement sera affecté. Une diminution de rendement serait à prévoir dans le cas où le feuillage et les tiges auraient été suffisamment affectés (photo 1a) pour que le plant produise des nouvelles talles à partir du collet. Le potentiel de rendement serait alors diminué par le fait que le rendement principal proviendrait des épis produits par ces talles secondaires.
Pour bien diagnostiquer la problématique au stade montaison, on doit couper la tige avec précaution et observer à la loupe l’état de l’épi en formation encore situé au bas de la tige. Un épi sain est turgescent (photo 1b). Si ce dernier a été affecté par le gel, il sera mou et aura perdu sa couleur vive (photo 1 c). Des dommages à ce stade peuvent entraîner une maturité inégale à la récolte et une baisse de rendement potentielle.
Au début de la montaison, on peut apercevoir l'épi en formation à la base du plant de blé (stade « Zadocks Z30 ») (photo 2).
Photo 2 : Stade « Zadocks Z30 » d'un plant de blé
Source : Stéphanie Mathieu, agr., MAPAQ
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