Plusieurs producteurs achètent à l’automne les semences pour le printemps prochain. Le choix des cultures et des cultivars qui seront ensemencés influence les risques de rencontrer des problèmes liés aux mauvaises herbes, aux insectes et aux maladies. Vous trouverez ici trois aspects à considérer lors de l’achat des semences afin de diminuer l’utilisation des pesticides lors de la saison prochaine et ainsi limiter l’impact de ces produits sur la santé et l’environnement.
1. Planifiez vos rotations
En plus des bénéfices économiques découlant de l’amélioration de la qualité des sols, l’alternance d’au moins trois cultures différentes dans un champ donné permet de réduire la pression de certains insectes, certaines maladies et facilite le contrôle des mauvaises herbes. La rotation des cultures facilite également la rotation des groupes d’herbicides (groupes de résistance) qui est essentielle pour lutter contre l’émergence de mauvaises herbes résistantes aux herbicides. L'utilisation des cultures de couverture réduit la pression des mauvaises herbes et peut être intégrée dans tous les types de régie. Il faut toutefois s'y prendre d'avance pour choisir les espèces végétales, commander les semences et planifier l'équipement et la fertilisation. Un sol bien structuré et riche en matière organique permet une émergence rapide des cultures et rend les racines moins sujettes aux maladies.
En 2019, des champs infestés par la chrysomèle des racines du maïs ont été rapportés au RAP Grandes cultures. Pour ces champs, la rotation est la méthode de lutte la plus efficace. Un autre problème qui a été signalé en fin de saison cette année : la pourriture à sclérotes dans le soya. Une rotation, en particulier avec une céréale, sans travail ou en travail minimum du sol favorisera la germination des sclérotes au printemps prochain. Les sclérotes ne germent qu’une fois, autant trouver un moyen de les « épuiser ».
Rotation + est un outil très facilitant pour planifier les rotations; il permet de comparer différents scénarios en intégrant les prix du marché et les différentes composantes déterminant les coûts de production (machinerie, fertilisation, etc.).
2. Choisissez des cultivars qui offrent de la tolérance ou de la résistance aux ravageurs problématiques sur votre entreprise
Le guide du Réseaux Grandes Cultures du Québec (RGCQ) est un outil précieux pour choisir des cultivars de maïs, de soya, de canola de printemps, de blé, d’avoine et d’orge bien adaptés à nos conditions grâce à des résultats d’essais comparatifs entre cultivars. Cliquez sur ces liens pour accéder à ce guide en format pdf ou à sa version interactive. En plus des rendements obtenus et autres caractères agronomiques, voici par culture, les insectes et les maladies pour lesquels des informations sur la tolérance ou la résistance des cultivars sont incluses :
Soya : pourriture à sclérotes (aucun cultivar n'est complètement résistant, mais certains sont plus tolérants que d’autres), nématode à kyste du soya et Phytophthora
Blé : fusariose de l’épi, oïdium (blanc), rouille brune, rouille jaune, taches foliaires et jaunisse nanisante
Avoine : jaunisse nanisante, tache ovoïde et rouille couronnée
Orge : fusariose, taches foliaires, oïdium (blanc) et rouille des feuilles
Maïs : pyrale du maïs, chrysomèle des racines, ver de l’épi du maïs, ver-gris noir, légionnaire d’automne et ver-gris occidental des haricots
Les guides de semenciers offrent également de l’information pouvant varier sur la tolérance des hybrides aux maladies foliaires et aux maladies de tiges ainsi qu’à la tolérance à la fusariose de l’épi. En ce qui concerne le soya, les guides de certains semenciers indiquent aussi la tolérance de leurs cultivars à d’autres maladies citées plus haut comme la brûlure phomopsienne.
Dans le cas des hybrides de maïs tolérants aux insectes, la protection est le fruit d’une technologie pour laquelle les insectes parviennent généralement à développer de la résistance. Ils réussissent ainsi à contourner l’effet protecteur. En effet, plusieurs populations de chrysomèles des racines du maïs aux États-Unis sont résistantes à certains hybrides Bt. La présence, en Nouvelle-Écosse, de pyrales du maïs résistantes à certains hybrides comprenant un seul caractère génétique (Cry1F) a aussi été confirmée en 2019. Il demeure donc important de n’utiliser cette technologie qu’en cas de besoin et de respecter les exigences de refuge.
Pour ne pas perdre la seule technologie Bt offrant une protection contre le ver-gris occidental des haricots, il serait judicieux de la réserver qu’aux champs les plus à risque. Pour en savoir plus sur les facteurs de risque, veuillez consulter la fiche technique Ver-gris occidental des haricots dans le maïs (grain et ensilage).
3. Refusez l’utilisation systématique des semences traitées aux insecticides
Deux classes d’insecticides de semences sont disponibles sur le marché. Ceux appartenant au groupe des néonicotinoïdes doivent faire l’objet d’une justification et d’une prescription agronomiques. Les insecticides appartenant au groupe des diamides (LUMIVIA, FORTENZA et LUMIDERM) ne sont pas réglementés, mais comportent néanmoins des risques considérables pour la santé et pour l’environnement.
Au Québec, il a été démontré que l’utilisation systématique des semences traitées aux insecticides n’est pas justifiée dans la culture du maïs, puisque les principaux ravageurs des semis, les vers fil-de-fer, ne causent des dommages économiques que dans une faible proportion des champs. L’outil VFF QC informe du niveau de risque (faible, moyen ou élevé) d’un champ donné pour évaluer s’il se retrouve avec des populations atteignant le seuil d’intervention pour l'espèce de ver fil-de-fer la plus fréquente au Québec. Dans la fiche technique du RAP sur l’outil, vous trouverez davantage d’explications sur son utilisation et sur l’interprétation des résultats obtenus.
Pour avoir accès à des semences sans traitement insecticide, il est généralement nécessaire de passer des commandes le plus tôt possible. En collaboration avec les compagnies semencières, une liste des hybrides de maïs disponibles pour la saison 2020 avec traitements de semences aux fongicides seulement (sans insecticides) a été publiée dans un bulletin d'information du RAP. Dans ce communiqué, vous trouverez également des informations sur les facteurs de risque et les moyens de lutte en lien avec tous les insectes, dont les vers fil-de-fer, pour lesquels les traitements de semences sont homologués afin d’y voir plus clair.
En ce qui concerne la culture du soya, utiliser des semences traitées avec de l’insecticide pour lutter contre les vers fil-de-fer n’est pas justifié, puisque ces derniers ne sont pas attirés par cette culture. Dans de rares cas, certains champs de soya peuvent toutefois être aux prises avec des problèmes de mouche des semis ou de vers blancs. Dans ces cas, les facteurs de risque, les méthodes préventives et les moyens de lutte énoncés dans le bulletin cité plus haut aident à prendre une décision éclairée quant à l’achat de semences traitées ou non.
Les traitements insecticides de semence sont efficaces pendant une période de trois à quatre semaines. Malgré que la plupart de ces traitements soient homologués pour contrôler le puceron du soya, ils ont un effet négligeable sur les pucerons, puisque ces derniers arrivent dans la culture vers la fin juin et que l’insecticide de semence n’est alors plus efficace. Nos meilleurs alliés pour contrôler le puceron du soya sont les ennemis naturels tels que les coccinelles. Autant les protéger en évitant les insecticides de semence.
Autres sources d’informations :
Vers blancs : les connaissez-vous vraiment?
Fiche technique du RAP Grandes cultures sur la mouche des semis
Brochure de la Caravane Santé des Sols (dans laquelle vous trouverez des informations sur les cultures de couverture)
Page Facebook Cultures de couverture du Québec
Pour des renseignements complémentaires, vous pouvez contacter l’avertisseure du réseau Grandes cultures ou le secrétariat du RAP. La reproduction de ce document ou de l’une de ses parties est autorisée à condition d'en mentionner la source. Toute utilisation à des fins commerciales ou publicitaires est cependant strictement interdite.
Le Réseau d'avertissements phytosanitaires (RAP) a pour mission d'informer les producteurs et autres intervenants du domaine agroalimentaire québécois au sujet de la présence et de l'évolution des ennemis des cultures dans leurs régions respectives, et au sujet des meilleures stratégies pour les gérer. Les communiqués du RAP Grandes cultures sont diffusés gratuitement par ces trois canaux : par courriel, via le site Web d’Agri-Réseau et via Twitter.