Les plantations sont bien avancées dans les régions plus au sud et ont été retardées dans les régions plus au nord étant donné les gels au sol enregistrés dans les nuits des 1er et 2 juin. La canicule de la semaine dernière a été suivie, en début de semaine, par des températures froides, sous les normales saisonnières. Ces extrêmes climatiques combinés à de forts vents ont causé du stress aux jeunes plants (photo1b).
L’usage de couvertures flottantes (toile thermique) permet de tempérer ces grands écarts météorologiques tout en procurant une protection contre des gels légers de 0,5 à -3 ºC selon le type de toile. Un système d’irrigation par aspersion pourrait être nécessaire en complément pour protéger du gel. Il est important de prévoir suffisamment d’arceaux afin d’éviter le contact des toiles avec la tête et le feuillage des jeunes plants (1,2 à 1,5 m entre chaque arceau) (photo 2). Ceci permet d’empêcher les dommages pouvant être causés par le vent (frottement) ou par contact thermique avec la toile sur les plants soit par gel ou par les rayons ultra-violets.
La sécheresse est généralisée et les systèmes d’irrigation sont fortement sollicités avant, pendant et après la plantation. Par contre, les bonnes conditions du sol lors des plantations sont un atout précieux pour la poursuite de la saison. Les racines pourront mieux se développer dans des sols qui n’ont pas été compactés par les excès de pluie comme c’est parfois le cas au printemps. Un système racinaire vigoureux est le meilleur atout pour optimiser la production des légumes fruits qui se récoltent sur une longue période de temps. Ensuite, il faudra veiller à ce que l’irrigation soit fournie en quantité suffisante et aux bons moments. On peut cependant dire que les plants partent du bon pied !
Quelques collaborateurs ont signalé la présence de pucerons ailés et aptères dans les tunnels et serres froides dans le poivron et l’aubergine en production biologique en Outaouais, en Montérégie et dans les Laurentides.
Dans le poivron, les seuils d’intervention recommandés sont :
- Sur jeunes plants : présence de pucerons aptères dans la tête des plants.
- Observation de 4 feuilles bien développées/plant : moyenne de 5 pucerons/feuille ou d’une colonie/plant sur 25 plants observés (total de 125 pucerons ou 25 colonies).
Dans l’aubergine, les mêmes seuils que ceux recommandés dans le poivron pourront être utilisés.
Les pucerons se cachent dans la tête des plants, autour des boutons floraux ou sur le revers des jeunes feuilles par exemple. Plusieurs espèces de pucerons peuvent se retrouver dans les tunnels. Le puceron vert du pêcher (Myzus persicae) et le puceron vert du melon ( Aphis gossypii) sont décrits dans des fiches IRIIS phytoprotection.
En agriculture biologique, les produits homologués pour les pucerons sont les huiles de culture (par exemple Suffoil-X) et les savons insecticides à base de sel de potassium d’acide gras, comme le Safer’s et le Opal, ainsi que le Trounce qui contient également de la pyréthrine. Toujours vérifier auprès de votre organisme de certification avant d’utiliser un produit. Ce sont des insecticides de contact qui doivent donc être pulvérisés directement sur les insectes pour être efficace, incluant le dessous des feuilles. Dans certaines conditions ces produits peuvent occasionner de la phytotoxicité, consulter l’étiquette pour des instructions précises d’emploi.
Les premiers adultes de doryphore de la pomme de terre ont fait leur apparition en Montérégie la semaine dernière et dans d’autres régions cette semaine. Leur émergence est ralentie par les températures plus fraîches. Pour l’instant, aucun traitement n’est nécessaire selon les observateurs du Réseau surtout que ce sont les jeunes larves qui seront visées par les traitements insecticides. Dépistez les champs, car la situation pourrait changer avec le retour de températures plus chaudes.
Stratégie de lutte
Le retrait des usages des insecticides à base d’imidaclopride (ADMIRE 240, ALIAS 240SC) et de thiaméthoxame (ACTARA 25 WG) utilisés dans l’eau de plantation et au sillon (ACTARA SC) tel que mentionné dans l’avertissement no 1 du 21 mai 2020, entraîne des changements majeurs au niveau des stratégies de contrôle. Le tableau suivant dresse la liste des insecticides homologués pour un traitement foliaire sur les plants.
Matière active (groupe de résistance) |
Nom commercial |
Autres insectes visés |
Commentaires |
Imidaclopride (4A Néonicotinoïdes) (nécessite une justification et une prescription agronomique) |
ADMIRE 240 ALIAS 240 SC |
Pucerons (Admire 240 seulement) |
Possibilité de populations de doryphores résistants. IRE : 211 IRS : 6 |
Flupyradifurone (4D:Buténolides) |
SIVANTO PRIME |
Pucerons |
IRE : 77 IRS : 18 |
Spinosad (5: Spinosynes) |
ENTRUST ENTRUST 80 SUCCESS |
Viser les petites larves seulement. IRE : 73 IRS : 2 à 4 |
|
Abamectine/cyantraniliprole Ca(6/28 : Avermectines/ Diamides) |
MINECTO PRO |
Ver gris, Altise tétranyque |
Doit être utilisé avec un agent tensio-actif, non –ionique qui permet à la solution de s’étaler ou de pénétrer dans le feuillage. Ne pas utiliser avec un adjuvant de type collant , ce qui nuirait au mouvement translaminaire dans la feuille. IRE : 222 IRS : 60 |
Chlorantraniliprole (28 : Diamides) |
CORAGEN |
Ver gris |
IRE : 91 IRS : 4 |
Cyantraniliprole (28 : Diamides) |
EXIREL |
Ver gris Puceron altise |
IRE : 175 IRS : 5 |
Cyclaniliprole (28 : Diamides) |
HARVANTA 50SL |
- |
IRE : 145 IRS : 6 |
Tétraniliprole (28 : Diamides) |
VAYEGO |
Ver gris |
IRE : 37 IRS : ND |
Note : se référer aux étiquettes pour les informations complètes
Points à considérer afin de choisir les insecticides qui seront appliqués au niveau foliaire sur les plants :
- Il faudra effectuer un suivi plus régulier des plantations, de 1 à 2 fois par semaine, puisque la rémanence des produits sera moins longue par rapport au traitement à la plantation ou au sillon. Elle pourra varier en moyenne de 5 à 15 jours, selon le produit, les conditions météo, la vitesse de croissance des plantes et la pression de l’insecte.
- Il est impératif d’alterner les groupes de résistance. À noter que des résistances partielles aux néonicotinoïdes et aux diamides sont documentées sur des populations de doryphores au Canada, incluant le Québec. Aux États-Unis, on rapporte des résistances partielles au spinosad surtout en agriculture biologique, puisque c’est souvent la seule matière active efficace et homologuée. Chaque site de production est unique en ce qui a trait aux degrés de résistance du doryphore vis-à-vis des différentes matières actives. L’historique des insecticides appliqués au cours des dernières années y fait pour beaucoup.
Efficacité des traitements :
- En règle générale, 24 à 48 heures après le traitement, il sera possible d’évaluer l’efficacité du produit sur les insectes. Après cette période, les doryphores auront cessé de s’alimenter, seront léthargiques ou morts.
- Lorsque c’est possible, visez les jeunes larves qui sont plus vulnérables aux traitements insecticides. En présence de grosses larves ou d’adultes, les doses maximales sont recommandées.
- L’imidaclopride agit de façon systémique dans le plant. L’insecticide circule de façon ascendante dans la sève pour rejoindre les parties supérieures du plant. Tous les autres insecticides sont translaminaires : le produit pourra traverser la surface supérieure de la feuille rejoignant ainsi la face inférieure, là où se trouvent les masses d’œufs et les jeunes larves de doryphore qui éclosent. Par contre, il sera important de s’assurer de la couverture complète du feuillage lors de la pulvérisation. Les nouvelles pousses qui apparaîtront suite au traitement ne seront pas protégées.
Protection des abeilles
Tous ces produits sont toxiques à hautement toxiques pour les abeilles. NE PAS les appliquer sur les cultures si des abeilles butinent. L’application peut être faite seulement tôt le matin et le soir lorsque la plupart des abeilles ne butinent pas. Dans tous les cas, veuillez vous référer aux étiquettes des produits.
Les indices de risque pour la santé (IRS) et pour l’environnement (IRE) sont des éléments à considérer afin de protéger l’environnement et la santé des utilisateurs. Plus le chiffre est élevé, plus le risque est élevé.
Seuils d’intervention
L’aubergine est une plante qui se développe relativement lentement et elle est hautement attractive envers le doryphore qui peut faire beaucoup de dommages rapidement par temps chaud. Les seuils d’intervention suggérés dans le tableau 2 ont été développés dans le Nord-Est des États-Unis. Pour visualiser la taille des quatre stades larvaires (L1 à L4) veuillez consulter la dernière page de ce feuillet technique sur la pomme de terre.
Technique de dépistage
Dépister de 25 à 30 plants par champ à une fréquence de 1 à 2 fois par semaine. Plus les températures sont chaudes plus le développement de l’insecte est accéléré. Les œufs éclosent entre 5 à 11 jours après la ponte. Porter une attention particulière aux bordures des champs orientés du côté où étaient les cultures attractives l’année précédente (aubergine, pomme de terre). Inspecter la face inférieure des feuilles à la recherche des masses d’œufs et vérifier les points de croissances des plants, car les petites larves aiment s’y alimenter. Si c’est possible, traitez uniquement les parties de champ pour lesquelles le seuil est atteint. Dans le sud du Québec, on assiste souvent à une seconde génération.
Pour l’instant aucun cas de bactériose n’est rapporté. Plus l’apparition du chancre bactérien (Clavibacter michiganensis subsp. Michiganensis) et de la moucheture bactérienne (Pseudomonas syringae pv. tomato) seront retardés, moins l’impact sur la culture sera important.
Étant donné que les plants peuvent être porteurs de la maladie sans démontrer de symptômes, la taille des drageons doit être bien réalisée afin de limiter les blessures aux plants. Ceci pourrait avoir un impact important sur la dissémination des maladies bactériennes. Dans les champs les plus hâtifs de tomates qui seront tuteurées ou drageonnées, les drageons du bas des plants ont atteint une longueur idéale pour procéder à leur taille.
Voici des recommandations pour procéder à la taille des drageons :
- Tailler des drageons tendres et jeunes, qui mesurent de 5 à 10 cm.
- À faire le matin, lorsque les drageons sont gorgés d’eau. Ils cassent plus facilement et la coupe est nette. Ceci permet également aux blessures de mieux cicatriser avant la tombée du jour.
- Des conditions asséchantes sont idéales. Attendre que la rosée soit disparue et que le feuillage soit sec. Les bactéries se multiplient à des vitesses exponentielles en présence d’eau et il faut éviter ces situations à risque en manipulant les plants.
- Si des foyers de plants suspects sont observés, procéder à la taille de ces zones en dernier et marquer l’endroit avec des fanions.
- Lorsque le drageon est plus long que 10 cm, ce qui n’est pas l’idéal, il est recommandé d’utiliser un sécateur ou un petit couteau. Le temps consacré à la taille sera plus long, les lignes de coupe seront plus importantes et cicatriseront moins vite. Ces plus grosses blessures infligées aux plants représentent des portes d’entrée pour les infections bactériennes.
- Pour les petits champs, il est souhaitable de se laver et désinfecter les mains à tous les 50 mètres et pour les plus grands champs à tous les 100 mètres. Cette mesure peut être compliquée à réaliser pour de grandes superficies.
Toute intervention de contrôle d’un ennemi des cultures doit être précédée d’un dépistage et de l’analyse des différentes stratégies d’intervention applicables (prévention et bonnes pratiques, lutte biologique, physique et chimique). Le Réseau d’avertissements phytosanitaires (RAP) préconise la gestion intégrée des ennemis des cultures et la réduction des risques associés à l’utilisation des pesticides.
Toute intervention de contrôle d’un ennemi des cultures doit être précédée d’un dépistage et de l’analyse des différentes stratégies d’intervention applicables (prévention et bonnes pratiques, lutte biologique, physique et chimique). Le Réseau d’avertissements phytosanitaires (RAP) préconise la gestion intégrée des ennemis des cultures et la réduction des risques associés à l’utilisation des pesticides. |
Cet avertissement a été rédigé par Christine Villeneuve, agr. (MAPAQ) et Karine Fortier-Brunelle, agr. (MAPAQ). Pour des renseignements complémentaires, vous pouvez contacter les avertisseures du réseau Solanacées ou le secrétariat du RAP. La reproduction de ce document ou de l’une de ses parties est autorisée à condition d'en mentionner la source. Toute utilisation à des fins commerciales ou publicitaires est cependant strictement interdite.