Recréer le rumen d’une vache dans un tube de laboratoire. C’est ce qu’une équipe de chercheurs du Portugal a tenté de reproduire en laboratoire pour évaluer l’effet de la ration alimentaire sur les « gaz d’échappement » du bétail.
Pourrait-on intégrer des algues à l’alimentation d’une vache pour réduire sa production de méthane, un gaz 25 fois plus dommageable que le CO2 ?
Utilisées anciennement dans les régions côtières européennes, les algues ont été employées comme alimentation pour le bétail en périodes de pénurie alimentaire. Des études ont même démontré que les moutons en consommaient à l’ère préhistorique. Cette ancienne pratique est revenue d’actualité alors que l’industrie animale est pointée du doigt comme un émetteur important de gaz à effet de serre. Jusqu’à présent, les efforts de recherche en ce sens se sont consacrés principalement à la modification du microbiote digestif (communauté bactérienne du rumen) du ruminant pour réduire les émissions gazeuses. Cette étude révèle que les algues présentent aussi un potentiel intéressant pour diminuer la production de méthane lorsqu’intégrées à la ration alimentaire.
Fourrages + ALGUES ?
Les algues utilisées comme source de glucides sont riches en minéraux organiques, en sucres complexes (entre 25-75% du poids sec), en pigments et en substances bioactives bénéfiques pour le rumen. La salle de fermentation alias « le rumen » est le lieu où les aliments ingérés sont transformés par la communauté bactérienne en place.
L’équipe portugaise a supplémenté la diète de base de l’animal avec cinq espèces d’algues différentes (rouge, verte et brune) afin de comparer les gaz issus de la fermentation dans un «rumen-laboratoire ». Les espèces d’algues ont été chacune combinées avec deux types de diète soit le foin et l’ensilage de maïs afin de vérifier l’effet réel de l’ajout de l’algue à l’alimentation animale. Dans les faits, le mélange algue-fourrage a été ajouté à un extrait frais de rumen de vache dans le tube et laissé fermenté 24 heures. L’expérience a simulé les conditions semblables à la réalité du rumen dans un système clos afin de retenir les gaz produits par la fermentation. Une fois la période expérimentale passée, les gaz sont prélevés puis analysés pour leur identification et leur quantification. Le ferment, la phase liquide du « rumen-laboratoire », est analysé pour les acides gras volatils et les dérivés d’ammoniaque.
Au terme de leurs études, les auteurs ont observé que l’ajout d’algues a causé une diminution de production de gaz comparativement au témoin, et ce, 24 heures suivant l’alimentation. Il en est de même pour le méthane, un gaz dommageable pour l’environnement, qui a vu son émission réduite pour tous les tests effectués avec des algues. Cet effet bénéfique s’explique probablement par des molécules particulières (métabolites secondaires) présentes naturellement dans les algues qui, selon l’espèce, en compte entre 300 et 1000 variantes distinctes. Ces perspectives prometteuses pour les algues en alimentation animale nécessitent toutefois des recherches supplémentaires afin de valider ces hypothèses in vivo (dans la vache) et d’évaluer la production ainsi que la qualité du lait.
Source consultée :
Maia MRG., Fonseca AJM., Oliveira HM., (2016). Mendonça C. et Cabrita ARJ. The potential role of seaweeds in the natural manipulation of rumen fermentation and methane production. Scientific reports 6:32321. Article Open-Source
DOI: 10.1038/srep32321
Un peu d’algues dans l’assiette des ruminants
Publié le 21 octobre 2016