En 2005, un de mes premiers projets était de réaliser des budgets dans diverses cultures biologiques dont un portant sur l’entreprise céréalière biologique pour les Références économiques du CRAAQ. À l’époque, la production biologique était perçue comme une alternative très intéressante, mais où les connaissances se faisaient plutôt rares.
Dix ans plus tard, je travaille de nouveaux sur des projets en agriculture bio et quelle n’est pas ma surprise de constater qu’il y a encore peu de données probantes disponibles sur ce secteur. Bien que cette alternative à la production conventionnelle soit aujourd’hui beaucoup plus présente sur le territoire agricole québécois, les informations sur les performances techniques, économiques et financières des entreprises demeurent peu connues.
Récemment, le Centre d’études sur les coûts de production en agriculture (CECPA) en collaboration avec le CRAAQ, le Syndicat des producteurs de grains biologiques du Québec, le MAPAQ, les Producteurs de grains du Québec et la FADQ ont convenu de se donner un premier regard. Grâce à la collaboration de producteurs spécialisés, il a été possible de cumuler plusieurs renseignements qui seront disponibles dès cet automne.
Afin de vous faire patienter, j’ai pris le temps d’analyser comment les rendements et les prix des grains bio ont évolué en comparant quelques observations de l’étude en cours, aux paramètres utilisés dans les budgets bios 2015 des Références économiques, à ceux de 2005.
Quelle ne fut pas mon étonnement! Les références de rendements dans le maïs-grain n’ont presque pas augmenté en dix ans. Pendant que la production de maïs-grain conventionnelle gagnait de près de 1,5 tonne/ha en moyenne en une décennie, les rendements en production biologique semblent avoir stagnés. En 2005, les références étaient de 6,5 tonnes/ha en moyenne pour le maïs-grain pour une zone de 2 500 UTM. Dix ans plus tard, les rendements moyens retenus en production biologique ont été révisés à la baisse à 6 tonnes/ha. Les observations effectuées récemment par le CECPA (5,5 tonnes/ha) pour des entreprises situées dans les régions de la Montérégie, du Centre du Québec, de la Mauricie et de Lanaudière tendent à confirmer cette orientation pour le maïs-grain. Comment expliquer ces résultats au niveau des rendements ? Est-ce la disponibilité des cultivars bio sur le marché qui sont presque les mêmes depuis dix ans ? Est-ce que les difficultés dans le contrôle des mauvaises herbes bloquent tout gain potentiel?
Dans le soya, les rendements retenus dans les Références économiques bio ont été majorés d’un peu mois de 10% depuis 2005. Ceci est relativement similaire comme écart à ce qu’on observe en production conventionnelle. Les observations effectuées sur le terrain pour l’année 2015 sont relativement cohérentes avec nos références (2,4 tonnes/ha). Est-ce que le soya serait une culture mieux maîtrisée par les entreprises?
Tableau 1 Comparaison des rendements
Nombreuses questions demeurent pour lesquelles je n’ai pas les réponses pour le moment. Et vous?
Au niveau des prix de vente des grains bio, ceux-ci ont varié en dix ans. Le prix de vente du maïs-grain a augmenté d’environ 80 % en dix ans. Il est passé de 300 $/tonne en 2005 à 545 $/tonne en 2015 pour le maïs bio. Pour le soya, l’augmentation de 400 $/tonne en dix ans n’est pas en reste.
Tableau 2 Comparaison des prix de vente
Parfois, les gens pensent que le prix de vente des grains bio est le double que ceux dans les grains conventionnels. Est-ce toujours vrai? Pour le savoir, j’ai fait une analyse sur l’écart entre les prix de vente des grains bio versus ceux des grains conventionnels de 2005 à 2015. La conclusion est que l’écart fluctue dans le temps (Figure 1).
Dans le maïs-grain, l’écart a varié de 1,6 à 2,6 de 2005 à 2015 avec un écart moyen de 2,2 sur dix ans. Dans le soya, l’écart de prix de vente entre le soya bio et le soya conventionnel est presque le même que le maïs-grain. L’écart a varié de 1,7 à 2,7 avec un écart moyen de 2,2 sur dix ans. Pour le blé panifiable, il y a plus de fluctuations. L’écart de prix de vente entre le blé panifiable bio et celui conventionnel a varié de 1,4 à 2,7 avec un écart moyen de 1,9. Ces écarts de prix de vente entre les grains bio et conventionnels sont les mêmes sur les marchés américains. Qu’est-ce qu’on doit en conclure? Il est certain que les prix de vente des grains bio sont plus élevés que les prix de vente des grains conventionnels. Cependant, il ne faut tenir pour acquis que les prix dans le bio sont toujours le double que dans le conventionnel. Les marchés, le jeu de l’offre et la demande viennent influencer ces prix de vente.
Figure 1 Évolution des écarts de prix de vente entre les grains biologiques et conventionnels de 2005 à
2015
En terminant, sur la base des observations réalisées, le CRAAQ produira de nouveaux budgets Références économiques bio. Deux nouvelles cultures feront également un retour, soit dans l’avoine et l’orge bio. Ils seront disponibles dès cet automne sur le site web du CRAAQ avec le reste de la collection. Créez-vous un profil sur le site du CRAAQ, afin d'être les premiers informés!
Rendement et prix de vente des grains bio : comment le secteur a évolué en dix ans ?
Publié le 15 juillet 2016