En tant qu’agriculteur ou agricultrice, il peut parfois être tentant de réutiliser ses semences dans le but d’économiser sur les coûts de production ou d’être davantage autosuffisant. Cette pratique peut être avantageuse lorsque les graines récoltées proviennent de semences à pollinisation libre alors qu’elle peut être déconseillée ou même interdite dans le cas de variétés spécifiques telles que certains hybrides et organismes génétiquement modifiés.
Pour maîtriser les bases de la génétique végétale, la compréhension du vocabulaire utilisé est nécessaire. Tout d’abord, selon le Règlement sur les semences et le programme des semences du gouvernement du Canada, voici la définition d’une variété et d’un hybride et de pollinisation libre :
Variété : ensemble de plantes cultivées, y compris les hybrides obtenus par pollinisation croisée contrôlée, qui
(a) se distinguent par des caractéristiques communes d’ordre morphologique, physiologique, cytologique, chimique ou autre; et
(b) conservent leurs caractéristiques distinctives après multiplication.
La signification de variété peut également être attribuée à un cultivar par l’Union internationale des sciences biologiques pour la nomenclature des plantes cultivées, selon le Règlement sur les semences du gouvernement canadien.
Différences entre les droits d’obtention végétale (DOV) et les brevets (Adapté de Varella, 2006, cité dans Estevez 2007) |
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Droit d’obtention végétale | Brevet | |
Recherche | La recherche scientifique est libre. L’exploitation de la nouvelle obtention est libre (il faut qu’elle soit suffisamment distincte). | Autorisation du titulaire des droits. La nouvelle variété pourra être brevetée, mais ne pourra pas être exploitée sans l’autorisation du titulaire du premier brevet. L’obtenteur peut refuser cette autorisation. |
Durée de protection | Varie en fonction de l’espèce | 20 ans |
Critères pour l’octroi des droits | Les variétés doivent être homogènes, stables et distinctes des autres variétés connues. | L’objet doit être nouveau, démontrer une activité inventive et avoir une application industrielle. |
Retour sur l’investissement | En Europe, les agriculteurs peuvent ressemer leurs grains en payant à l’obtenteur une «?contribution équitable?». | À chaque nouvelle moisson, les producteurs devront payer des redevances proportionnellement à la quantité ressemée ou cueillie. Le titulaire du droit peut refuser la possibilité d’utiliser les grains produits comme semences. |
Extensions | Les agriculteurs peuvent utiliser leurs grains comme semences librement sauf dans les pays où une redevance sur les semences de fermes est imposée. Le commerce des semences de ferme est alors interdit. Le titulaire n’a pas de droit de regard sur la commercialisation ou la possibilité d’exiger des paiements de droits de propriétés industrielles. |
Dans la création d’une nouvelle variété où l’on introduit une séquence génétique déjà brevetée, le titulaire aura des droits sur la nouvelle plante obtenue. |
Conditions d’obtention |
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Source : Le guide des brevets |
Exemple | Hybride de canola tolérant à la hernie des crucifères | Gène de résistance à l’herbicide Roundup de Monsanto |
En plus des protections d’obtention végétales et des brevets, les agriculteurs et les agricultrices peuvent se procurer des semences canadiennes certifiées, soit des semences de qualité, inspectées par l’Agence canadienne d’inspection des aliments et produites par des producteurs spécialisés selon des conditions précises. Cette certification permet :
- une semence propre;
- une pureté variétale;
- une assurance de la qualité garantie;
- un accès à de nouvelles perspectives;
- de la traçabilité;
- de nouvelles améliorations génétiques;
- une garantie à toute épreuve;
- une utilisation maximale d’autres intrants;
- un accès à des marchés de premier choix.
De plus, il est important de savoir que les semences certifiées font partie des normes obligatoires et recommandées pour les productions de céréales, de cultures émergentes ou de maïs-grain et oléagineux par La Financière agricole du Québec.
Lorsqu’un agriculteur souhaite produire sa propre semence à partir d’une semence certifiée, il perd cette certification et les avantages y étant associés.
La production de semences de ferme est toutefois possible et pratiquée par certains producteurs de grandes cultures au Québec. Dans de tels cas, le Syndicat des producteurs de grains biologiques du Québec discute de plusieurs éléments à prendre en compte pour une production de semences de ferme réussie, soit :
- Les conditions d’admission dans le cadre du suivi pour La Financière agricole du Québec (FADQ);
- L’absence d’organisme de contrôle;
- L’importance de connaître la semence d’origine;
- La vérification des équipements;
- Les analyses obligatoires;
- L’obligation de remplir un registre des semences pour le suivi de la production.
Comme mentionné plus haut, la réutilisation de ses semences fait intervenir plusieurs mécanismes génétiques. La tâche de reproduction fidèle d’une variété est alors plus complexe et c’est pourquoi il est recommandé de s’informer adéquatement auprès des ressources disponibles avant de commencer cette pratique. Enfin, il ne faut pas perdre de vue les avantages obtenus par l’achat de semences certifiées, qui restent une norme pour les entreprises agricoles canadiennes.
Références
Estevez, B. (2007). La question de la redevance sur les semences. Syndicat des producteurs de grains biologiques du Québec. Repéré à
https://www.agrireseau.net/agriculturebiologique/documents/LA%20QUESTION%20DE%20LA%20REDEVANCE%20SUR%20LES%20SEMENCES%20fin.pdf
La Financière agricole. (2020). Guide des normes reconnues par La Financière agricole en matière de pratiques culturales : Productions de pomme de terre, céréales, cultures émergentes, maïs-grain et oléagineux. Repéré à
https://www.fadq.qc.ca/fileadmin/fr/assurance-recolte/guide-normes-pommes-terre-cereales-mais-grain-oleagineux.pdf
Office de la propriété intellectuelle du Canada. (2020). Le guide des brevets. Repéré à https://www.ic.gc.ca/eic/site/cipointernet-internetopic.nsf/fra/h_wr03652.html#whatYouCanPatent1
Office de la propriété intellectuelle du Canada. (2020). Protection des obtentions végétales. Repéré à https://www.ic.gc.ca/eic/site/cipointernet-internetopic.nsf/fra/wr04589.html
Syndicat des producteurs de grains biologiques du Québec (SPGBQ). (2006). Protocole de production de semences à la ferme en régie biologique. Repéré à
https://www.agrireseau.net/agriculturebiologique/documents/Protocole%202006%20et%20annexes.doc%20pour%20agri-réseau.pdf
Varella, Marcelo D. (2006). Propriété intellectuelle et semences : Comment une multinationale détourne «?légalement?» les lois d’un pays. Dossier inf’ogm No 78.
10 excellentes raisons d’utiliser une semence certifiée. (s.d.). Repéré à https://seedgrowers.ca/fr/agriculteurs/10-excellentes-raisons-dutiliser-une-semence-certifiee/