Sur la culture en serre
Les faits saillants des événement météorologiques qui ont influencé la production et les ventes sont présentés plus bas. Globalement, le printemps a été tardif à cause du réchauffement très lent aux mois d’avril et mai.
En mars, les moyennes des températures mensuelles ont été légèrement plus chaude par rapport à 2022 (+0,7 °C). Les jours de précipitations moins élevées qu’en 2022 (8 jours par rapport à 17 jours) mais plus de temps nuageux sont les caractéristiques du mois.
Le mois d’avril a été 10% plus ensoleillé et plus chaud de 1,5 °C en moyenne que 2022. Un épisode de verglas (5-6 avril) a embarrassé plusieurs exploitations avec des coupures de courant et des déchirures de recouvrement de serre. Suite à la période nuageuse et pluvieuse de 5-6 jours à la fin d’avril, la déshumidification a été importante pour éviter les problèmes de pourriture et de Botrytis. Une vague de chaleur de plus de 20 °C du 10 au 16 avril a favorisé les ventes pour Pâques et à suscité l’intérêt du consommateur pour le jardinage à venir. Les nuits froides d’avril, surtout à la fin du mois et au début de mai, ont retardé la venue du printemps ont conduit à peu de ventes hâtives (plants de légumes comme les tomates) pour les chaines et les centres jardins.
En mai, la moyenne des températures fut 2,3 °C plus basse et avec des précipitations inférieures à l’année 2022. L’ensoleillement fut similaire à 2022. La météo a été favorable durant la semaine précédant la fête des Mères (14 mai) avec du temps ensoleillé et plus chaud. Par la suite, les températures de nuits ont été anormalement froides du 14 mai au 26 mai (5-6 °C). Le 17 et le 18 mai au matin, les fleurs et les plants de légumes sur les aires de vente ont dû être protégé car il y a eu un gel mortel.
Pour la fête des Patriotes (20-22 mai), les précipitations et les nuits froides ont ralentis les ventes sur les points de ventes au détail. Elles ont repris de la vigueur par la suite car le temps s’est réchauffé à partir du 27 mai.
Les ventes se sont poursuivies à un bon rythme jusqu’en début de juin avec un creux vers le 7 juin. On dénotait un surplus de plants de tomates, de légumes divers et de fleurs chez certains détaillants et producteurs.
Comme chaque année est particulière, le contexte économique post-Covid et le mauvais temps lors de la période des ventes ont réduit le volume des ventes en 2023.
Sur les valeurs sures
Les fleurs autant que les plants de légumes ont trouvé preneurs. Voici quelques produits appréciés par le consommateur cette année :
- Les pots patio « prêt-à-décorer » de 30 à 45 cm;
- Les plants de légumes et de fines herbes biologiques ou non;
- Les plantes d’accompagnement en format de 10-12 cm;
- Les paniers suspendus incluant les fraises et les fougères;
- Les géraniums;
- Le bégonia Rieger et les autres espèces de bégonia;
- Les plantes succulentes;
- Les plantes tropicales d’intérieur ou d’extérieur (en petits formats, gros pots de palmiers de la Floride, etc).
Avec les années COVID de 2020 et 2021, la crainte d’une pénurie de plantes ornementales, de légumes et de fournitures a motivé fortement les achats des consommateurs. Ces derniers, confinés à la maison, ont voulu faire une oasis pour la saison estivale. La passion des plantes s’est invitée chez de nouveaux jardiniers car le confinement favorisait les activités de jardinage (potager et embellissement) ainsi que la cuisine et le bricolage.
Depuis la fin du confinement en 2021, plusieurs se demandent si le consommateur sera toujours enclin à acheter avec passion des fleurs et des plants de légumes. Depuis 2022, il semble qu’une partie des nouveaux jardiniers ont été déçu des résultats de leur potager et ont abandonnés cette activité. En effet, pour une personne sans expérience qui installe un potager pour la première fois, le résultat peut être décevant et coûteux. On a toujours dit, qu’en période récession les gens restent chez eux et embellissent leur propriété. Verra-t-on ce comportement en 2024 ? Les consommateurs entrent dans une période d’incertitude avec la hausse marquée des taux d’intérêt, de l’inflation et les conflits mondiaux. Vont-ils allouer une partie de leur temps et leur budget discrétionnaire à d’autres activités (restaurant, voyages, rénovations, loisirs) plutôt que l’embellissement de leur propriété et l’installation de potagers ? Selon la publication, Baromètre 2022 de la consommation responsable, les Québécois ont restreint leurs achats de biens et ils choisissent moins de produits locaux qu’ils perçoivent comme chers. De plus, toujours selon cette publication, il y a une stagnation du jardinage et du bricolage.
La nouvelle édition du Baromètre 2023 de la consommation responsable (novembre 2023) mentionne que les consommateurs modifient certaines pratiques de consommation en raison de la hausse du coût de la vie. Ils comparent les prix et diminuent leur consommation.
Toujours en parlant des consommateurs, ils sont de plus en plus critiques envers l’utilisation des emballages et des contenants en plastique. Ils désirent acheter des produits avec le moins de plastique possible. En réponse à cela, certains producteurs commercialisent des fleurs, des plants de légumes et de fines herbes en contenant biodégradable On peut les identifier dans les points de ventes au détail.
Les chaines d’approvisionnement pour les intrants de productions (exemples : chariots, pots, substrats, matériaux de serre, combustibles, diesel, etc) sont maintenant plus stables et sont revenues généralement à la normale. On espère que les conflits mondiaux ne viendront pas enflammer les courts du prix du pétrole.
La hausse du prix des intrants pour les entreprises est toujours présente mais moins importante que les dernières années. Ajustez vos prix de vente pour 2024 pour conserver vos marges.
Il devient souvent difficile pour les entreprises de faire de l’optimisation des intrants dans le but de réduire les coûts de production. Par exemple, le changement de fournisseurs, des méthodes de travail, de la gestion de l’énergie demande du temps et de la planification mais cette opération peut valoir le coup. Faites vos calculs.
Dans la majorité des entreprises, les ravageurs qui ont causé le plus de problèmes sont les thrips, les pucerons et les tétranyques. Pour les maladies, le blanc et la moisissure grise ont été prédominantes. De plus en plus de producteurs utilisent la lutte biologique pour contrôler les ravageurs.
Le Programme du ministère de l’agriculture du Québec ayant pour objectif de doubler la surface de production en serre va bon train. Plusieurs exploitations utilisent ce programme pour augmenter leur surface de production et moderniser les installations.
En terminant, les travailleurs saisonniers étrangers sont toujours essentiels pour la bonne marche du secteur. De plus, la relève entreprenariale peut faire défaut chez de nombreuses entreprises et, pour ceux qui en prévoient, elle doit se planifier sur plusieurs années d’avance.
En conclusion
Il est difficile de prévoir le comportement du consommateur en lien avec l’inflation, la hausse de taux d’intérêts et les conflits mondiaux. De plus, le secteur est influencé par les conditions de la météo lors de la mise en marché. Avec le contexte économique, l’année 2024 sera une année charnière sur le comportement et la demande du consommateur envers le jardinage.
Les consommateurs seront au rendez-vous mais peut être avec un pouvoir d’achats réduit et en achetant différemment. Sachant cela, les producteurs doivent jouer de prudence et ne produire ce que leurs acheteurs leur demandent. Évitez les productions excédentaires sans contrat. Pour 2024, la promotion de l’industrie doit se poursuivre (circulaires, évènements, réseaux sociaux, sites web, médias locaux et nationaux, etc) afin de demeurer dans la vision du consommateur.
Bonne saison 2024
Michel Senécal, agr.
Consultant - Cultures en serre
michel.senecal9@gmail.com
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