Grandes cultures, Avertissement No 24, 6 septembre 2024

Amarante tuberculé : nouveau foyer découvert dans la MRC du Haut-Saint-Laurent en Montérégie : pensez à la biosécurité. Ver-gris occidental du haricot : moment idéal pour évaluer les dommages aux épis de maïs. Pyrale du maïs dans le maïs de grande culture : surveillez la présence de larves et de dommages et gare au développement de la résistance au BT. Gestion automnale de la vergerette du Canada résistante au glyphosate.

 
AMARANTE TUBERCULÉE : NOUVEAU FOYER DÉCOUVERT DANS LA MRC DU HAUT-SAINT-LAURENT EN MONTÉRÉGIE : PENSEZ À LA BIOSÉCURITÉ
M.-É. Cuerrier1 et Amélie Picard1
1. Agronome (MAPAQ)

Le RAP Grandes cultures réalise le dépistage de l’amarante tuberculée dans les champs depuis 2018. Pour la saison 2024, jusqu’à présent, 24 populations d’amarante tuberculée ont été identifiées et confirmées résistantes par le Laboratoire d'expertise et de diagnostic en phytoprotection (LEDP) du MAPAQ à un ou plusieurs groupes d’herbicides, parmi les groupes 2, 9 et 14. Ces populations ont été retrouvées principalement dans la région de la Montérégie (17 cas), mais également dans les régions du Centre-du-Québec (1), des Laurentides (4) et de l’Outaouais (2) (voir le tableau ci-dessous). En Montérégie, la présence de la plante a été confirmée pour la première fois dans la MRC du Haut-Saint-Laurent. Pour connaître toutes les régions dans lesquelles des populations d’amarante tuberculée ont été confirmées dans le passé, vous pouvez également consulter le dernier bilan ici. Si vous êtes situé dans une région où la présence de la plante est connue, portez une attention particulière aux mesures de biosécurité à mettre en place, tel que le nettoyage de la moissonneuse-batteuse et l’ordre de récolte des champs (les plus infectés en dernier). Consultez la trousse d'information La biosécurité dans le secteur des grains pour plus de détails.

À ce moment de l’année, il est encore temps de dépister les champs afin de vérifier si la plante est présente, particulièrement dans les champs de soya où les plants d’amarante tuberculée dépassent la canopée. Si vous suspectez de la résistance, des tests moléculaires et classiques de détection sont disponibles gratuitement au LEDP afin de confirmer le profil de résistance de la population en question. Ces informations permettront de mieux cibler les herbicides efficaces contre les populations présentes sur l’entreprise agricole en prévision de la prochaine saison de culture. Pour en savoir plus, consultez Votre trousse « Résistance des mauvaises herbes » 2024. Notez également que le Plan d’intervention pour lutter contre l’amarante tuberculée a été reconduit pour l’année 2024. Ce plan vise principalement à offrir aux producteurs touchés par la présence d’amarante tuberculée, un encadrement agronomique assurant une réponse rapide et efficace contre cette mauvaise herbe envahissante. Les conseillers en grandes cultures du MAPAQ de votre région détiennent également une expertise de pointe dans la lutte contre l’amarante tuberculée. N’hésitez pas à les contacter afin de profiter d’un soutien agronomique, dans le respect de la confidentialité.
 
Tableau 2 : Nombre de populations d'amarante tuberculée découvertes en 2024 en fonction de leur(s) résistance(s) par groupe d'herbicides, par MRC et par région administrative
Région administrative MRC Groupe d'herbicides Nombre de populations résistantes Total par région
(07) Outaouais Papineau 2 et 9 2 2
(15) Laurentides Thérèse-de-Blainville 2 et 9 1 4
Mirabel 2 1
2 et 9 1
Deux-Montagnes nd 1
(16) Montérégie Haut-Richelieu 2 et 9 8 17
2, 9 et 14 3
Brome-Missisquoi 2 et 9 3
Haut-Saint-Laurent 2 et 9 1
2 et 9 1
Les Jardins-de-Napierville 2 et 9 1
2, 9 et 14 1
(17) Centre-du-Québec Drummond 2 1 1
Total 24
* nd : Les analyses de détection de la résistance aux herbicides sont toujours en cours
Source : LEDP (MAPAQ), 2024


VER-GRIS OCCIDENTAL DU HARICOT : MOMENT IDÉAL POUR ÉVALUER LES DOMMAGES AUX ÉPIS DE MAÏS
J. Saguez2, M.-É. Cuerrier1 et B. Duval1 
1. Agronome (MAPAQ); 2. Chercheur (CÉROM)

Les larves de ver-gris occidental du haricot (VGOH) s’alimentent actuellement sur les épis de maïs. C’est le moment idéal pour évaluer les dommages qu’elles causent. L’évaluation peut être réalisée dès maintenant dans le maïs ensilage, alors que dans le maïs grain, elle peut être réalisée un peu plus tard, jusqu’à la récolte. Toutefois, une évaluation en ce moment permet de confirmer que les dommages sont bien dus aux larves de VGOH et non à d’autres espèces (ver de l’épi, légionnaire d’automne ou pyrale du maïs).
Image Agri-Réseau

Larves de ver-gris occidental du haricot (VGOH) et d'autres ravageurs du maïs. Notez que la larve du VGOH porte deux larges bandes brun foncé derrière la tête

Photos à gauche, au centre gauche et à droite : B. Duval, agr. (MAPAQ)
Photo au centre droit : LEDP (MAPAQ)


L’évaluation des dommages s’effectue en épluchant les épis, sans les arracher, sur 100 plants bien répartis dans le champ (10 plants consécutifs, dans 10 stations ou 5 plants consécutifs, dans 20 stations), afin d’estimer le pourcentage d’épis infestés.

Cette évaluation permet également d’observer l’ampleur des dommages directs liés à l’alimentation sur les épis, ainsi que la présence et l’incidence des maladies, comme la fusariose. Dans une grande majorité des cas, les larves s’introduisent au niveau des soies et demeurent au niveau de l’apex de l’épi. Elles peuvent faire des trous dans les spathes (feuilles entourant l’épi) et des galeries à différents emplacements sur les épis. Des excréments en forme de petites boules, facilement visibles au moment du dépistage, peuvent être observés à l’intérieur de l’épi. Ceci peut laisser croire que les dommages aux épis sont importants, mais en général, très peu de grains sont mangés.

Des dommages indirects
Le VGOH peut favoriser le développement de certains pathogènes, tel que Fusarium graminearum, le champignon responsable de la fusariose de l’épi. Selon les conditions météorologiques, il serait possible d’observer un développement de maladie sur les épis. Même si le VGOH augmente les risques de maladie, les épis non infestés par le VGOH peuvent aussi être contaminés par la fusariose.

Planification de la prochaine saison
L’évaluation des dommages sur les épis causés par le VGOH peut aider à orienter le choix des hybrides pour la prochaine saison. Les hybrides, dont les spathes recouvrent bien les épis, pourraient mieux protéger contre les attaques par le VGOH. Le recours à des hybrides de maïs contenant la protéine Bt Vip3A, une protéine insecticide, permet de lutter efficacement contre le VGOH. Cependant, afin d’éviter le développement de résistance, ces hybrides doivent être utilisés judicieusement, car il s’agit de la seule technologie Bt efficace contre le VGOH. Par ailleurs des hybrides Vip3A ne sont pas encore disponibles pour toutes les régions du Québec.
 
Image Agri-Réseau

Larves du ver-gris occidental du haricot à différents stades de développement et dommages causés aux épis

J. Saguez (CÉROM)

Image Agri-Réseau

Larves du ver-gris occidental du haricot à différents stades de développement et dommages causés aux épis

J. Saguez (CÉROM)

Image Agri-Réseau

Larves du ver-gris occidental du haricot à différents stades de développement et dommages causés aux épis

J. Saguez (CÉROM)

Image Agri-Réseau

Larves du ver-gris occidental du haricot à différents stades de développement et dommages causés aux épis

J. Saguez (CÉROM)

 
Image Agri-Réseau

Excréments du ver-gris occidental du haricot

S. Mathieu, agr. (MAPAQ)

Image Agri-Réseau

Trous dans les spathes causés par le ver-gris occidental du haricot

S. Mathieu, agr. (MAPAQ)

 
Image Agri-Réseau

Développement de champignon pathogène sur un épi ayant été infesté par le ver-gris occidental du haricot

J. Saguez (CÉROM)

 

PYRALE DU MAÏS DANS LE MAÏS DE GRANDE CULTURE : SURVEILLEZ LA PRÉSENCE DE LARVES ET DE DOMMAGES ET GARE AU DÉVELOPPEMENT DE LA RÉSISTANCE AU BT
J. Saguez2, B. Duval1 et M.-É. Cuerrier1 
1. Agronome (MAPAQ); 2. Chercheur (CÉROM)

La pyrale du maïs peut s’attaquer à de nombreuses plantes, mais principalement au maïs (sucré, ensilage, grain). Les larves s’alimentent sur toutes les parties aériennes des plants, mais les dommages les plus importants sont les trous et les galeries creusés dans les épis et les tiges. Ces dommages peuvent constituer une porte d’entrée pour des pathogènes, ce qui peut affecter la qualité du grain. La tenue des plants de maïs peut également être compromise

La pyrale est généralement bien contrôlée par les hybrides de maïs exprimant des protéines Bt qui ciblent cette espèce. Toutefois, au cours des dernières années, des cas de résistance ont été rapportés dans plusieurs provinces canadiennes, dont le Québec. Plusieurs projets de recherche effectués en Amérique du Nord visent à suivre l’évolution de la résistance.

Au Québec, des cas de résistance de la pyrale du maïs au maïs Bt ont notamment été observés en Montérégie. Si vous observez des dommages au maïs causés par la pyrale, vous pouvez contacter Julien Saguez au CÉROM (julien.saguez@cerom.qc.ca) qui ira prélever des spécimens.

Le bulletin d'information suivant présente les plus récentes informations en lien avec l'état de situation de la pyrale du maïs dans le maïs de grandes cultures au Québec et dans les provinces canadiennes.

 
GESTION AUTOMNALE DE LA VERGERETTE DU CANADA RÉSISTANTE AU GLYPHOSATE
Pulication originale (2023) : S. Mathieu1, M.-É. Cuerrier1, A. Picard1 et V. Samson1
Révision 2024 : M.-É. Cuerrier1, B. Duval1 et A. Picard1
1. Agronome (MAPAQ)

Les cas de vergerette du Canada résistante au glyphosate sont en hausse, particulièrement dans le sud-ouest de la province. En 2024, 17 nouvelles populations résistantes ont été découvertes, dont neuf d’entre elles sont résistantes, entre autres, au glyphosate (groupe 9). Jusqu’à ce jour, 64 populations de vergerette résistantes à au moins un groupe d’herbicides ont été confirmées.
 
Tableau 2 : Nombre de populations de vergerette du Canada résistantes aux herbicides au Québec en date du 6 septembre 2024
Région administrative MRC Résistance par groupe d'herbicides Nombre de populations de vergerette du Canada
Centre-du-Québec Arthabaska 2 1
Estrie Le Granit 9 1
Lanaudière L'Assomption 2 et 9 1
Montérégie Beauharnois-Salaberry 9 2
2 et 9 5
Brome-Missisquoi 2 et 9 1
Le Haut-Saint-Laurent 2 17
9 2
2 et 9 20
Les Jardins-de-Napierville 9 3
Le Haut-Richelieu 9 2
2 et 9 1
Vallée-du-Richelieu 2 1
9 2
Les Maskoutains 2 2
2 et 9 1
Vaudreuil-Soulanges 2 2
Total 64
Les résultats sur la résistance aux herbicides sont issus de tests de détection moléculaire réalisés par le Laboratoire d'expertise et de diagnostic en phytoprotection (LEDP) du MAPAQ

La vergerette du Canada est une plante annuelle hivernante. Les graines sont produites vers les mois d’août et de septembre et présentent peu de dormance. La majorité des graines, se situant dans le premier centimètre de sol, germent dès l’automne et développent une rosette (photo B). Les plants passent l’hiver sous cette forme et reprennent leur croissance hâtivement au printemps suivant, causant ainsi de la compétition aux cultures annuelles. C’est donc à l’automne que la vergerette au stade rosette devrait être contrôlée.
 
Image Agri-Réseau

Différents stades de la vergerette du Canada : plantule au stade 6 feuilles (A), rosette (B) et plants matures (C)

Photos A et B : LEDP (MAPAQ), Photo C : S. Mathieu, agr. (MAPAQ)


Un dépistage est recommandé, entre autres dans les champs en semis direct, pour détecter la présence de la vergerette du Canada. Afin d’aider au contrôle de cette mauvaise herbe, des actions peuvent être mises en place dès cet automne :

En prérécolte
  • Un traitement herbicide peut être effectué avant la récolte du soya, si la population de vergerette du Canada est importante et seulement si vous craignez qu’elle nuise à la récolte, puisque les plants de vergerette ayant produit des graines ont déjà complété leur cycle vital et mourront. Plus d’informations sur les traitements en prérécolte sont détaillées dans la fiche technique Gestion des mauvaises herbes en fin de saison dans le soya. Pour rappel, le glyphosate ne sera pas efficace si la mauvaise herbe a été confirmée résistante au groupe 9. Par ailleurs, si vous suspectez de la résistance, il est important de faire une demande d’analyse auprès du Laboratoire d’expertise et de diagnostic en phytoprotection (LEDP). Pour plus d’information sur les méthodes d’échantillonnage et les procédures à suivre pour les tests de détection de la résistance, consultez Votre trousse « Résistance des mauvaises herbes » pour 2024.  
 
En postrécolte
  • Travailler le sol : la vergerette du Canada étant adaptée aux systèmes sans travail de sol, la population de vergerette nouvellement établie pourrait être réduite en travaillant le sol quelques semaines après la récolte de la culture principale. En cas de forte densité, il est toutefois possible que le contrôle ne soit pas optimal, puisque le système racinaire de la plante peut retenir du sol et lui permettre de survivre. L’incorporation des graines à plus de 6 cm de profondeur par un travail de sol les empêchera de germer, mais leur survie sera prolongée. Cependant, il faut rester vigilant si un second travail de sol en profondeur est effectué, puisque les graines seront remontées à la surface et pourront alors germer.
  • Semer une culture de couverture : elle permet de compétitionner la mauvaise herbe. Un essai en Ontario a démontré qu’un travail du sol réalisé quelques semaines après la récolte, suivi de l’implantation d’une culture de couverture de seigle d’automne a permis de diminuer la vigueur et la population de vergerette du Canada grâce au phénomène d’allélopathie, ce qui a facilité le contrôle de la mauvaise herbe l’année suivante. L’implantation d’une céréale d’automne, telle que le blé, aidera également au contrôle de la vergerette du Canada, puisqu'elle ne tolère pas l’ombre.
  • Appliquer un traitement herbicide : il doit être appliqué seulement lorsque la plante est toujours en croissance active. Les matières actives comme le dicamba, le 2,4-D, le saflufenacil et le diflufenzopyr offrent un bon contrôle. On doit toutefois s’assurer de faire une rotation des groupes d’herbicides, en tenant compte des herbicides ayant été appliqués dans le passé, pendant la saison et ceux qui sont prévus à la saison prochaine, tout en tenant compte de la culture qui sera ensemencée ainsi que des résistances des autres mauvaises herbes présentes, s’il y a lieu.

D’autres méthodes de lutte peuvent être employées, telle qu’une fauche si la vergerette du Canada n’a pas encore produit de graines. L’arrachage manuel suivi d’une disposition adéquate des plants en dehors du champ est aussi une option, dans le cas où la mauvaise herbe est localisée en foyers.

En prévision de la prochaine saison, si la culture prévue est du soya transgénique, les variétés de soya tolérant différents herbicides, tels que le 2,4-D, le dicamba, le glufosinate et le glyphosate, connues sous différentes marques de commerce (p. ex. : LIBERTYLINK, ROUNDUP READY 2 XTEND, XTENDFLEX ET ENLIST E3), offrent des options de désherbage qui peuvent aider au contrôle de la vergerette du Canada.

Pour plus d’information sur la biologie de cette mauvaise herbe, consultez la fiche technique Vergerette du Canada.

 
Toute intervention envers un ennemi des cultures doit être précédée d’un dépistage et de l’analyse des différentes stratégies d’intervention applicables (prévention et bonnes pratiques, lutte biologique, physique et chimique). Le Réseau d’avertissements phytosanitaires (RAP) préconise la gestion intégrée des ennemis des cultures et la réduction des pesticides et de leurs risques.



Pour des renseignements complémentaires, vous pouvez contacter l’avertisseure du sous-réseau Grandes cultures ou le secrétariat du RAP. Édition : Amélie Picard, agronome et Lise Bélanger (MAPAQ). La reproduction de ce document ou de l’une de ses parties est autorisée à condition d'en mentionner la source. Toute utilisation à des fins commerciales ou publicitaires est cependant strictement interdite.