Selon les résultats obtenus dans cet essai, il semblerait bien que c’est possible et que la méthode utilisée semble fiable.
Méthodologie
Les observations ont été réalisées en 2017 avec la collaboration de cinq clubs agro-environnementaux de la Montérégie dans le cadre d’un réseau de parcelles portant sur la fertilisation minérale azotée du maïs-grain. Le travail d’égrenage et de pesée a été réalisé avec la collaboration et l’équipement du CÉROM. Les épis ont été recueillis sur 35 sites différents totalisant 958 échantillons, chaque échantillon variant de 20 à 50 épis. Nous avons donc manipulé plus de 40 000 épis dont le poids total dépassait les 10 tonnes.
La méthodologie de cet essai était fort simple. Les épis étaient pesés à l’aide d’une balance électronique au champ avant leur battage. Chaque échantillon était battu à l’aide d’une batteuse expérimentale équipée d’un capteur de rendement donnant les informations suivantes : pesée des grains humides (kg), teneur en eau des grains (%) et poids spécifique des grains (kg/hl). La batteuse a été préalablement calibrée avec une série d’échantillons qui ont été évalués en laboratoire selon les standards reconnus par l’industrie. Les rendements ont été calculés selon quatre (4) méthodes :
RA1= rendement en grains estimé à partir du poids des épis, du ratio moyen des grains/épis de tous les échantillons de 2017 (n=958) et d’une teneur en eau des grains de 3 épis;
RA2= rendement en grains estimé à partir du poids des épis, du ratio moyen des grains/épis des échantillons du 5 octobre 2017 (n=146) et d’une teneur en eau des grains de 3 épis;
RA3= rendement en grains estimé à partir du poids des épis, du ratio moyen des grains/épis des échantillons de l’essai (n=24) et d’une teneur en eau des grains de 3 épis;
RA4= rendement en grains estimé à partir du poids des épis, du ratio moyen grains/épis de 3 échantillons de l’essai (n=3) et d’une teneur en eau des grains de 3 épis.
Cet essai visait à vérifier :
- Si les pesées d’épis entiers étaient bien corrélées aux pesées des grains à la suite du battage des épis à la batteuse;
- S’il est possible d’utiliser des pesées d’épis entiers de maïs-grain au champ pour évaluer correctement les rendements en grains;
- Si les analyses statistiques des données du poids des épis sont similaires à celles obtenues des rendements en grains ajustés à 14.5 % d’humidité pour une série de données correspondant à des essais structurés au champ selon quatre approches RA (voir ci-dessus).
Analyse des résultats
Les résultats du Tableau 1 indiquent que sept (7) séries d’échantillons ont été évaluées du 5 octobre au 7 novembre 2017 totalisant 958 échantillons. Chacun des échantillons était composé de 20 à 50 épis. Les valeurs des R2 (coefficient de régression linéaire) pour chacune de ses sept séries variaient de 0.97 à 0.99 avec une moyenne de 0.98. Les coefficients de régression linéaire indiquent quels sont les proportions (en pourcentage) expliquées d’une série de données par rapport à une autre série de données. Donc, les pesées des épis (g) sont donc très bien liées aux rendements en grains (g) des parcelles.
Les teneurs en eau ont diminué du 5 octobre au 7 novembre de 32.7 à 24.2 %, ce qui est tout à fait cohérent avec l’avancement phénologique du maïs-grain au cours de cette période. Les ratios moyens du poids des grains sur le poids des épis ont varié de 0.84 à 0.89 avec une moyenne de 0.88 pour l’ensemble des 958 échantillons. Les écarts-types de chacune des séries ont varié de 0.01 à 0.03 correspondants à des coefficients de variation de 1.4 à 3.8 %. Les valeurs minimales des ratios des séries ont varié de 0.726 à 0.861 tandis que les valeurs maximales de 0.898 à 0.977. Bien qu’il y ait eu un peu de variations dans la valeur des ratios, le ratio moyen semble osciller autour de 0.88 en 2017. Cette valeur a donc été utilisée pour évaluer les rendements dans les tableaux 2 à 4 sous la colonne RA1.
Selon les résultats des tableaux 2 à 4, les teneurs en eau des grains ne sont généralement pas significativement différents entre les traitements évalués. Il serait donc possible d’utiliser, sans trop se tromper, une teneur en eau moyenne provenant de quelques épis (3) d’un essai pour calculer les rendements en grains sur une base de 14.5% d’humidité pour l’ensemble de l’essai. C’est ce qui a été utilisé comme méthode pour estimer les rendements selon les quatre méthodes évaluées (RA1, RA2, RA3 et RA4).
Les valeurs des ratios (RAT) du poids des grains sur le poids des épis ne sont généralement pas significativement différentes entre les traitements d’un même essai à l’exception de deux traitements dans l’essai 433N1 au Tableau 2 et d’un seul traitement dans l’essai 433N9 au tableau 4. Un nombre réduit d’échantillons pourrait donc être utilisé pour évaluer les rendements en grains à partir de poids d’échantillons d’épis entiers. L’utilisation d’une valeur moyenne de ratio a donc été testée selon quatre approches provenant d’un nombre de plus en plus réduit d’observations soit de 958 à 3 valeurs, l’approche à 3 valeurs serait bien sûr la plus simple d’utilisation au champ si elle permet effectivement d’obtenir des analyses statistiques similaires à celles basées sur un plus grand nombre d’observations.
Voici un autre constat intéressant obtenu à partir du battage des épis. Lors du battage stationnaire des épis, nous avons noté la présence des spathes autour des épis pour 5 des 958 échantillons traités. Nous avons constaté que les ratios poids des grains sur le poids des épis étaient similaires avec la présence ou non des spathes. Le poids des spathes n’est pas très important et ne semblent donc pas affecter le ratio grains/épis. Ceci est un constat intéressant car il ne semble donc pas nécessaire de retirer les spathes de l’épi, ce qui permet d’accélérer la récolte au champ.
Pour chacun des essais évalués, les résultats statistiques des essais sont similaires entre les variables rendement en grains (REN) et poids des épis (EPI). Tous les facteurs significatifs le sont pour chacune de ces deux variables dans les mêmes proportions et ce pour chacun des trois essais. Des analyses de régression linéaire (données non présentées) indiquent que les R2 ont varié de 0.92 à 0.99 entre les rendements calculés à la suite de l’égrenage et les rendements estimés en utilisant les différents ratios grains/épis et la teneur en eau des grains de 3 épis. Les relations sont donc excellentes entre les rendements estimés (ratios grains/épis et teneur en eau de 3 épis) et les rendements mesurés à la suite de l’égrenage.
Selon les résultats obtenus dans cet essai, on peut conclure :
- Que les poids des épis à la récolte sont très bien corrélés aux poids des grains des mêmes épis égrenés;
- Que puisqu’il n’y a pas beaucoup de différences dans les teneurs en eau des grains et les ratios poids des grains/poids des épis entre les différents traitements évalués d’un même essai, il serait possible d’utiliser un nombre réduit d’épis (3) pour estimer les rendements en grains (kg/ha) à 14.5% d’humidité d’un essai entier au champ;
- Les rendements estimés en utilisant l’approche RA4 soit celle qui exige le moins de temps et d’énergie provenant uniquement de 3 épis correspond de manière acceptable (R2 supérieurs à 0.92) aux rendements réels mesurés à la suite de l’égrenage de tous les épis de tous les échantillons d’un essai.
Les résultats de cette étude ne proviennent toutefois que d’une seule année d’essai. Cependant, puisque les observations réalisées proviennent d’un grand nombre de sites différents (35) qui correspondent à autant de conditions différentes de croissance, il est fort probable que le ratio grains sur épi change très peu en fonction des saisons ou même en fonction des hybrides.
Certains pourraient reprocher à la méthode de ne pas permettre de déterminer l’effet des traitements à l’essai sur les teneurs en eau et les poids spécifiques des grains. Dans le cas de la fertilisation minérale azotée, les doses d’azote ont peu d’impacts sur ces deux variables. En effet, la fertilisation minérale azotée a eu un impact significatif sur ces deux variables que dans moins de 1% des cas selon une étude publiée en 2019.
https://www.agrireseau.net/agroenvironnement/blogue/99598?utm_source=agroenvironnement2019-03-08&utm_medium=courriel&utm_campaign=ABO
TABLEAU 1. Données liant le poids des épis avant le battage et le poids des grains après battage Nb. Obs. : Nombre d’observations réalisées pour chacune des dates de battage
R2 : Coefficient de régression linéaire liant le poids des épis avant battage et les rendements en grains après battage
TEE : Teneur en eau moyenne des grains (%) récoltés
RATIO : Ratio moyen du poids des grains sur le poids des épis
E.T. : Écart-type moyen du RATIO
C.V. : Coefficient de variation (%) = ET/RATIO
MIN : Valeur minimale du RATIO
MAX : Valeur maximale du RATIO
TABLEAU 2. Analyse statistique de l’essai de fertilisation minérale azotée no. 1 (433N1)
TABLEAU 3. Analyse statistique de l’essai de fertilisation minérale azotée no. 7 (433N7)
TABLEAU 4. Analyse statistique de l’essai de fertilisation minérale azotée no. 9 (433N9) Notes sur les tableaux 2, 3 et 4
REN= rendement en grains en kg/ha à 14,5% d’humidité;
PSP= poids spécifique des grains en kg/hl;
TEE= humidité des grains à la récolte (%);
EPI= poids des épis avant battage (g);
RAT= ratio du poids des grains sur le poids des épis;
RA1= rendement en grains estimé à partir du poids des épis, du ratio moyen de tous les échantillons de 2017 (n=958) et d’une teneur en eau des grains de 3 épis;
RA2= rendement en grains estimé à partir du poids des épis, du ratio moyen des échantillons du 5 octobre 2017 (n=146) et d’une teneur en eau des grains de 3 épis;
RA3= rendement en grains estimé à partir du poids des épis, du ratio moyen des échantillons de l’essai (n=20) et d’une teneur en eau des grains de 3 épis;
RA4= rendement en grains estimé à partir du poids des épis, du ratio moyen de 3 échantillons de l’essai (n=3) et d’une teneur en eau des grains de 3 épis.
*, ** : seuils statistiquement significatifs aux seuils respectifs de 0.05 et 0.01
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